Back from… The Ned

Grandeur retrouvée !

Un hôtel, un club et une collection de restaurants au coeur de la City londonienne, voilà pour le pitch minimal et déjà pas banal de ce qui s’avère immanquablement être l’ouverture de l’année, de la décennie et sans doute de ce siècle Outre-Manche. Et pas la peine de se demander, si à la lumière du récent Brexit, il serait encore bon de prendre ce pari déjà complètement fou à la base, il suffit d’en pousser les portes quelques jours à peine après l’ouverture, d’y tenter une réservation pour une table ou pour la nuit pour avoir la réponse aussi cinglante qu’évidente : oui mille fois oui ! Et que l’on ne vienne pas me parler pas d’un inévitable effet de mode ou de la chance de débutant car nous ne sommes ni dans l’un ni dans l’autre de ces cas de figure.

Il fallait tout de même une sacrée dose d’optimisme et un grain de folie plus que certain pour imaginer un tel projet et oser s’attaquer à pareil monument. L’ancien siège de la vénérable Midland, autrefois première banque du pays et numéro un dans le monde, sert, en effet, de cadre phénoménal à cette nouvelle aventure hôtelière à même de faire passer toutes les autres pour de simples babils. Situé au pied de Bank Station et défiant la Banque d’Angleterre à laquelle il fait face, l’immeuble, classé Grade 1, au même titre que Buckingam ou Westminster, ne passe pas inaperçu dans la City. Son imposante façade conçue par le fameux architecte Sir Edward Luytens, autrefois affectueusement surnommé Ned par ses intimes, vient de renouer avec sa gloire passée sans rien renier de ses illustres origines.

L’ancien siège de la vénérable Midland, autrefois première banque du pays et numéro un dans le monde, sert, en effet, de cadre phénoménal à cette nouvelle aventure hôtelière à même de faire passer toutes les autres pour de simples babils.

Ce petit miracle, nous le devons essentiellement à un homme. Sans son opiniâtreté légendaire et son impayable côté visionnaire, rien de ce qui fait aujourd’hui The Ned n’aurait pu voir le jour. Il eut été impossible à Nick Jones de le laisser en d’autres mains et de voir une énième chaine s’emparer de ce joyau à l’instar du 10 Trinity repris récemment par le groupe canadien Four Seasons à quelques mètres de là. Faute de pouvoir lui -même y installer une de ses Soho Houses dont le concept d’exclusivité comme le nom ne pouvaient s’accommoder d’un tel gigantisme, on parle là de 30.000m2, l’homme s’est donc tourné vers son président Ron Burkle et également actionnaire majoritaire du Sydell Group d’Andrew Zobler, dont je vous ai déjà parlé ici, pour faire de son rêve une réalité. La réponse ne se fit pas attendre et tomba sous le sens. Pourquoi ne pas réunir les deux acteurs du renouveau hôtelier de chaque côté de l’Atlantique pour créer quelque chose d’aussi unique qu’inattendu ? Car il fallait bien tout le talent conjoint des équipes de Sydell et de Soho House pour espérer sortir la tête haute de ce qui aurait vite pu tourner au cauchemar chez d’autres et en dessiner tous les contours. Le résultat est là. Typiquement anglais et incroyablement new-yorkais, The Ned, ainsi qu'il a été baptisé, est né comme prévu le mois dernier ou a plutôt su renaitre tant tout dans ce projet donne aujourd’hui l’illusion d’avoir toujours existé. Nous sommes ici conviés à une reconstitution historique qui tient de la gageure. Car, avec The Ned, nous entrons aussi bien dans la démesure que dans l'inédit. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Avec un hall de 3.000m2, 800 employés, 252 chambres, 12 étages, 9 restaurants, 6 salons et salles à manger privés, 2 piscines dont une sur le toit, 2 salons de coiffure pour chacun, 1 club de fitness, 1 salle de boxe, 1 spa, 4 bars dont un de nuit, voilà bien le prototype de l’hôtel à fuir… sur le papier uniquement car le résultat, lui, vaut vraiment le détour et se mérite. Aussi fou que cela puisse paraître, il faudra en effet s’armer de patience pour espérer, comme on le rappelait précédemment, y décrocher une table ou une chambre et pire encore réussir un check-in ou un check-out en 5 minutes chrono. Ici, le temps ne se joue pas seulement de nos mémoires, il peut aussi et espérons-le pour un temps seulement, celui de se familiariser avec le succès, jouer avec les nerfs de celui choisissant d’arriver pile à 16h ou à 12h, horaires implacables qui désactiveront ou activeront aussi immédiatement qu’odieusement l’accès à tous les espaces réservés aux seuls résidents ou membres du Club. Ne l'oublions pas, The Ned est non seulement un hôtel mais aussi et peut-être avant tout un Club privé réservé à ses membres.

AvecThe Ned, nous entrons aussi bien dans la démesure que dans l’inédit

Il ne faudra donc pas prévoir de passer sa dernière après-midi avant de reprendre son Eurostar dans les délices du Spa Cowshed, l’opulence de marbre rose du hammam ou de marbre vert de la piscine intérieure chauffée de vingt mètres et encore moins aux abords très encombrés de celle sur le toit qui avec ses dix mètres fait plus office de pédiluve que de véritable bassin et dont les quelques transats ont bien du mal à contenir la demande dès les premiers rayons de soleil sortis. Inutile de mentionner que vous ne pourrez alors, une fois votre précieux sésame rendu, espérer prendre un dernier verre ou même passer une tête au Vault où vous avez pourtant passé une soirée géniale la veille. Le bar abrité derrière sa porte blindée et décoré de ses quelques 3.800 coffres qui faisaient autrefois tourner la tête de Goldfinger n’a pas fini de faire parler de lui. Mais nous ne méprenons pas car tout ici ou presque fonctionne très bien voire peut-être trop bien. À commencer par les chambres à l’esprit résolument rétro piochant là-encore dans le répertoire des Années Folles et combinant cuir et galuchat, loupe de noyer et marqueterie, tentures de soies et de velours, lustres à pampilles et services à cocktails complets avec alcools et verres en cristal idoines, lavabos Thomas Crapper & Co et baignoires assorties repérées dans la salle de bains de Lord Bute au château de Cardiff, lits en chêne et parfois à baldaquins comme dans les parfaites chambres et suites dites Héritage, prises d’assaut et non photographiées dans ce report. Si tout le monde ne pourra se permettre de séjourner dans la Luytens Suite de 100m2 avec son accès privé au rooftop, il faudra tout de même éviter les Family Suites aux plafonds rabaissés comme le Crash Pad de 17m2 à 175£ (ou bien moins pour les moins de 30 ans) sauf peut-être dans le cas d’un voyage d’affaires éclair. Ceci étant posé, il serait terriblement injuste de ne pas rendre hommage au formidable théâtre des Menus Plaisirs qu'est The Ned et saluer, comme il se doit à la fin de la représentation, le travail titanesque et stupéfiant de précision réalisé par l’équipe de design emmenée conjointement de chaque côté de l’Atlantique par Alice Lund et Adam Greco, ou tirer son chapeau à Gareth Banner le Managing Director qui semble faire tourner son petit monde comme sur la scène d’un manège enchanté tout comme à Niels Kirstensen, le F&B Manager qui jongle sans relâche entre ses bars et restaurants aux menus et saveurs multiples.

The Ned s’impose-t-il comme le meilleur hôtel de Londres ? Il en est en tout cas le plus complet comme le plus réjouissant d’entre tous, follement désirable !

Aussi bien Cecconi’s qui trouve ici, après Berlin, Miami, Istanbul, Hollywood et Mayfair, sa seconde adresse anglaise que Zobler qui célèbre la cuisine yiddish des Delis New Yorkais, que Café Sou rendant hommage à Paris ou Malibu Kitchen qui surfe sur la vague des « avocado toasts », que Kaia, l’hawaïen avec ses « happy bowls », que The Luytens Grill, steackhouse qui sert la viande sur un plateau d’argent dans un décor intimiste que Millie’s, gardant pour lui les grands classiques de la cuisine anglaise, tous font mouche et régalent autant l’appétit que l’esprit. Qu’en penseraient aujourd’hui les banquiers autrefois réunis dans l’ancienne et impressionnante salle du conseil avec son décor néo-médiéval, ses boiseries, ses immenses cheminées à inclusion de verdite et sa légendaire tapisserie ? Face à cette grandeur retrouvée, adouberaient-ils ce Ned comme le meilleur hôtel de Londres ? En feraient-ils leur club attitré ? Si nul ne le saura jamais, nous, nous sommes sûrs que The Ned en est le plus complet comme le plus réjouissant d’entre tous, follement désirable !

Mots : Patrick Locqueneux

Images : Patrick Locqueneux | Olivier Chevalier

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À partir d’env. 200€/nuit • petit déjeuner

Surclassement selon disponibilité • early check-in & late check-out selon disponibilité • petit déjeuner • accueil personnalisé • 100$ de crédit

 
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