Back from… The Standard London

De l'art de faire du Standard

En baptisant sa chaine d’hôtels Standard, André Balazs avait sans doute pour ambition de faire de chacun d’entre eux, une référence en la matière. Pour cela, il n’avait pas hésité à rajouter en plus du nom de la ville dans lequel ils s’érigeaient un article défini pour en rappeler la force et l’unicité.

À l’exception de New York et de Los Angeles où deux adresses allaient finalement voir le jour, se compléter et prendre plutôt le nom des quartiers dans lesquels ils s’inscrivaient, The Standard Miami comme The Standard London qui nous occupe particulièrement aujourd’hui portent bien dans leur terminologie cet esprit de conquête et cette assurance un peu folle de leur fondateur désormais retiré. Si dans le cas de Miami, en faisant le pari de viser les iles et les canaux au lieu du front de mer, le gourou n’a pas réussi à imposer son point de vue, il est fort probable que ce soit, contre toute attente, le cas à Londres.

The Standard London, aussi étonnant que celui puisse paraître, a déjà tout d’une icône.

Qui aurait pris le pari d’investir les abords on ne peut plus immédiats d’une gare si grande et si belle soit elle pour ouvrir l’hôtel le plus « bankable » du moment ? Après des années de négociations et de travaux, force est de constater que l’ancien hôtel de ville brutaliste reconverti et flanqué d’un ascenseur extérieur totalement futuriste avec sa capsule rouge lancée à la conquête des étages supérieurs désormais totalement vitrés a bien plus que de l’allure. Au même titre que la gare de St Pancras, chef d’œuvre d’architecture gothique victorienne qu’il regarde droit dans les yeux, The Standard London, aussi étonnant que celui puisse paraître, a déjà tout d’une icône. Que les Cassandre d’un jour, pessimistes de tout poil et autres mal embouchés ravalent leur salive, le concept même d'hôtel de gare toujours hâtivement baptisé l’Hôtel de la Gare, comme s'il ne pouvait en avoir qu'un ou une, vient de trouver avec The Standard London un nouveau mètre-étalon, à condition de balayer toutes les idées reçues.

le concept même d’hôtel de gare vient de trouver avec The Standard London un nouveau mètre-étalon

Ce nouveau Standard n’a définitivement et heureusement rien à voir avec celui qui lui fait face désormais dans les anciennes St Pancras Chambers qui abritaient autrefois le Midland Grand Hotel. Au néo-gothique de George Gilbert Scott s’oppose désormais le néo-futurisme culotté d’Orms, les architectes en charge de la coque revue et agrémentée de 3 étages, et de l’Interior Designer Archer Humphries flanqué du designer historique du groupe, Shawn Hausman. À l’époque assistant de production sur le film Saturday Night Fever puis créateur dans les années 80 de la boite new-yorkaise Area, le designer basé à LA ne cesse depuis les débuts de sa collaboration avec Balazs, il y a 20 ans, de renouer avec les marqueurs une époque pop et surréaliste que les films déjantés d’Austin Powers ou ceux très léchés de Wes Anderson nous donnent encore à revivre. Dans une ambiance underground cosmopolite, design scandinave, style Memphis, Op art, céramiques Mid-Century en all over, plastique moulé, couleurs franches en grandes largeurs, s’en donnent à cœur joie dans un pastiche follement réjouissant proche de l’étourdissement et terriblement intelligent.

Dans ce centre géographique de Londres, dépourvu pour l’heure de véritables attaches culturelles ou patrimoniales, bat le pouls de demain

Tout y fait sens à commencer par les rideaux plissés comme les fenêtres incurvées des 266 chambres rappelant les compartiments de trains, leur ergonomie pointue comme leur capacité à s’effacer devant le paysage ici tout en urbanité comme en majesté. Le plus bel exemple en est sans doute la Queen of Queens avec sa vue d’angle sur la gare et sa banquette en arc de cercle. Mais que dire de la King’s Terrace où Hausman s’est payé le luxe d’installer entre deux claustras végétales de géniales baignoires balnéo extérieures avec vue plein ciel ou de la Suite Spot avec son bar intérieur. Il y a près d’une quarantaine de configurations différentes toutes aussi séduisantes à l’exception peut- être, bien que superbement agencées, de ces Cosy Core dépourvues de fenêtres à réserver aux noctambules avertis ou aux businessmen coincés entre deux trains. On passera également sur les peignoirs totalement iconoclastes signées Craig Green. La St Martin’s School n’étant pas loin, il fallait bien une petite référence à la mode qui dès la dernière London Fashion Week y a pris ses quartiers d’office. Dans ce centre géographique de Londres dépourvu pour l’heure de véritables attaches culturelles ou patrimoniales, bat en effet un autre pouls, celui de demain. Voilà le coup de génie d’Amar Lalvani, CEO du groupe Standard Hotels, d’avoir anticipé l’implantation des géants de la tech comme Google ou de la fine fleur du luxe comme LVMH autour de ce qui est clairement l’un des projets commerciaux les plus fous de la capitale, le Coal Drop Yards de Thomas Heatherwick livré l’année dernière et déjà la coqueluche des touristes comme des londoniens se moquant du Brexit.

Le coup de génie aura été de penser l’hôtel comme partie prenante de ce développement

L’autre coup de génie aura été de penser l’hôtel comme partie prenante de ce développement, en ouvrant directement sur la rue et plus particulièrement l’un des trois restaurants. Le Double Standard à mi-chemin entre le « rade » côtier et le « diner » anglo-saxon pur jus s’y dispute le rez-de-chaussée avec Isla, cantine supra chic mixée aux résurgences d’une ancienne bibliothèque municipale réinventée avec bonheur, à une cabine d’enregistrement pour DJs ou podcasters en herbes et à un bar semi-ouvert aux allures de roulotte new-age. Aux manettes, Adam Rawson excelle à taper dans le mile des deux côtés, healthy et frais pour l’un, plus roboratif pour l’autre. Si Isla puise son inspiration sur les côtes anglaises et fait la part belle au voyage en bordure de sa terrasse ombragée, Double Standard revisite quant à lui les classiques à l’image des burgers dont le chef s’est fait une spécialité. La critique ne s’y trompe pas, elle adore et crie carrément au chef d’œuvre pour Decimo, le troisième restaurant de ce Standard London qui comme son nom l’indique occupe le 10ème étage du building. Cornaqué ici par le chef étoilé Peter Sanchez-Iglesias, cette sorte d’antre flanqué de rideaux en macramé, de plafonds en rotin et ceint de terrasses surélevées autour d’une cheminée centrale en passe d’ouvrir et encore sous embargo photo à l’époque promettait déjà, rien qu’à la visite, de valoir une messe à lui seul. Considéré dorénavant comme le restaurant le plus affolant du moment, il complète sur cet étage le bar le plus dingue de la capitale qui avec ses miroirs facettés sur cinq mètres de haut et ses vues plongeantes sur la skyline londonienne deviendra dès son ouverture imminente tout aussi légendaire que son homologue de la High Line à New York.

Avec ses trois restaurants et ses deux bars, The Standard London a immanquablement ouvert une nouvelle ère à King’s cross

Bien sûr, l’on pourra toujours arguer qu’il manque à The Standard London une piscine, une salle de sport digne de ce nom sans parler d’un spa à l’image de celui de Miami pour parfaire le pitch mais diable que tout cela parait déjà brillament enlevé, d’autant plus qu'on ne s'y attendait pas. Avec ses trois restaurants et ses deux bars, The Standard London a immanquablement ouvert une nouvelle ère à King's cross. De l’art de faire du Standard ! 

Mots : Patrick Locqueneux

Images : Patrick Locqueneux | Olivier Chevalier

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À partir d'env. 190€/nuit

Surclassement selon disponibilité • early check-in & late check-out selon disponibilité • petit déjeuner • accueil personnalisé

 
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